Le rôle des compétences socio-comportementales des élèves dans l’amélioration des résultats scolaires en France

Researchers:
Adrien Bouguen
Axelle Charpentier
Coralie Chevallier
Elise Huillery
Fieldwork by:
Location:
Aix-Marseille, Créteil, Amiens, Lille, Lyon, Paris and Versailles, France
Sample:
97 Middle Schools
Chronologie:
2014 - 2019
Target group:
  • Students
Outcome of interest:
  • Enrollment and attendance
  • Student learning
Intervention type:
  • Information
AEA RCT registration number:
AEARCTR-0000376
Partners:

Les compétences psychosociales, telles que la motivation, la persévérance et l’autodiscipline, peuvent jouer un rôle aussi important que les aptitudes cognitives dans la réussite scolaire et professionnelle des élèves. Des chercheurs ont évalué l’impact d’une série de discussions en classe au collège qui soulignent l’importance de ces compétences sur le comportement des élèves et les résultats aux tests. Le programme a eu un impact positif sur les résultats scolaires des participants, en particulier parmi les filles, les élèves dont le comportement avant le programme était satisfaisant, et ceux ne bénéficiant pas d’aide financière. Les résultats indiquent que cet impact est dû par un changement d’état d’esprit des élèves, l’amélioration des comportements à l’école et l’ajustement de leurs aspirations professionnelles.

Policy issue

Les compétences psychosociales des élèves, telles que la motivation, la persévérance et l’autodiscipline, sont de plus en plus considérées comme des facteurs clés de réussite scolaire et professionnelle. Investir dans le développement de ces compétences à l’école peut être particulièrement bénéfique pour les enfants issus de milieux défavorisés et contribuer à combler l’écart de réussite entre les écoles.1 Cependant, on en sait encore peu sur la malléabilité de l’état d’esprit des élèves et sur l’impact des politiques visant à améliorer les compétences psychosociales des élèves sur la réussite scolaire.

Context of the evaluation

Afin de réduire l’impact des inégalités socio-économiques sur la réussite scolaire des élèves, la France a établi depuis 1981 une politique d’éducation prioritaire grâce à laquelle les écoles situées dans quartiers concentrant des populations faisant face à des difficultés sociales (Zones d’Éducation Prioritaire) peuvent bénéficier de ressources publiques supplémentaires. Cependant, la France reste l’un des pays de l’OCDE où le lien entre l’origine sociale et la réussite scolaire reste le plus fort,2 avec une probabilité d’échec scolaire importante pour les élèves issus de milieux défavorisés ou dont les parents sont moins qualifiés.3 Pour combler cet écart, le gouvernement français soutient des programmes éducatifs en faveur des élèves dans les écoles de l’éducation prioritaire, tel que celui mis en œuvre par Énergie Jeunes, partenaire de cette évaluation.

female student in class holding a book
Photo: Énergie Jeunes

Details of the intervention

Des chercheurs se sont associés à Énergie Jeunes pour mesurer l’impact du programme Exploiter tout son potentiel sur le comportement des élèves et leurs résultats scolaires (moyenne générale et résultats obtenus lors des examens nationaux). Le programme consiste en trois sessions de 55 minutes par an durant les quatre années du collège. Ces séances, s’appuyant sur les enseignements de la littérature psychologique, ont été conçues pour encourager les élèves à adopter un état d’esprit de développement, en soulignant l’importance de la persévérance dans le développement de leurs aptitudes intellectuelles. Le programme invitait également les élèves à définir des objectifs annuels d’amélioration personnelle par rapport à leur performance et comportements à l’école (p. ex., améliorer les notes dans une matière donnée) afin de développer leur agentivité.

97 établissements scolaires publics se sont portés volontaires pour participer au programme. Le programme a été offert aux élèves entrant en classe de sixième au début des années scolaires 2014-2015 et 2015-2016. Dans chaque école, une cohorte d’élèves, désignée de manière aléatoire, s’est vue offerte le programme pendant quatre ans, tandis que l’autre a servi de groupe de comparaison.

Pour mesurer l’impact de l’intervention, les chercheurs ont utilisé les données administratives de l’école pour observer les performances scolaires et les comportements des élèves (p. ex., retard, absentéisme, sanctions disciplinaires). Des enquêtes ont été menées auprès des enseignants et des élèves afin de mesurer différents traits de caractères prédictifs de la réussite sociale et sociale des personnes, ainsi que le retour perçu par les élèves sur leur niveau d’effort.

Results and policy lessons

Figure  1 Impact du programme sur la moyenne générale en classe de troisième
graph representing students mindset

Le programme a eu un impact positif sur les résultats scolaires des participants, en particulier parmi les filles, les élèves dont le comportement avant le programme était satisfaisant, et ceux ne bénéficiant pas d’aide financière. Les résultats indiquent que cet impact est dû par un changement d’état d’esprit des élèves, l’amélioration des comportements à l’école et l’ajustement de leurs aspirations professionnelles.

Amélioration des performances scolaire: Les étudiants ayant participé au programme Exploiter tout son potentiel sur ont vu leurs résultats scolaires (moyenne des notes obtenues dans les principales matières ) augmenter de 0,07 point d’écart-type (SD) après quatre ans. Le programme a eu un impact immédiat dès la classe de sixième, et les effets se sont avérés plus importants sur les résultats scolaires des filles (0,08 points de SD en classe de troisième), des élèves ne bénéficiant pas d’aide financière (0,8 points de SD en classe de troisième) et ceux dont le comportement avant le programme était satisfaisant (0,10 points de SD en classe de troisième). Cependant, l’impact positif du programme sur les notes ne s’est pas matérialisé avant la classe de troisième année pour les garçons et les récipiendaires d’aide financière. L’intervention n’a eu aucun impact sur les notes des élèves qui avaient de mauvais comportements à l’école avant la mise en œuvre du programme.

L'impact du programme sur la moyenne générale des élèves peut être interprété comme une simple conséquence du comportement de notation des enseignants, qui surestimeraient les résultats des élèves soit parce qu'ils savent qu'ils sont observés, soit parce qu'ils récompensent les meilleurs comportements en classe. Les chercheurs ont utilisé les résultats de l'examen national du collège pour montrer que ce n'est pas le cas. Le programme a également eu un impact sur les performances des élèves à l'examen national (0,028 point de SD) avec des résultats essentiellement concentrés sur les sciences humaines : Français (0.045 point de SD), Histoire et géographie (0.028 point de SD) et l'examen oral (0.034 point de SD). Les résultats de l'examen national montrent que le programme a eu un impact réel sur les compétences scolaires des élèves, soit par l'amélioration des connaissances ou des compétences, soit parce que les élèves traités ont fourni plus d'efforts lors de l'examen.
Figure 1: Impact du programme sur la moyenne générale en classe de troisième
 
Ces différences d’impact en fonction des groupes d’élèves sont probablement dues au fait que les filles, les non-récipiendaires d’aide financière et les élèves ayant un bon comportement étaient plus susceptibles de participer au programme et moins à même de s’absenter et de manquer certaines parties de l’intervention.

Les résultats de l’évaluation indiquent que l’amélioration des performances scolaires des participants était due à un changement d’état d’esprit des élèves, une amélioration de leurs traits de caractère et comportements, ainsi que des aspirations professionnelles plus élevées.

Évolution de l’état d’esprit: L’intervention a permis de développer un état d’esprit de développement croissance parmi les participants et les a incités à réévaluer leurs perspectives de réussite scolaire. Le programme a entraîné une augmentation de 0,04 points de SD du retour perçu sur l’effort par les élèves. Similairement aux différences d’impact observées sur les notes scolaires, l’impact du programme d’ajustement du retour perçu sur l’effort était plus prononcé parmi les filles, les non-récipiendaires d’aide et les élèves qui avaient un bon comportement avant le programme.

Amélioration des traits de caractère et des comportements: Le caractère des élèves (selon l’opinion de leurs enseignants) s’est amélioré tout au long du collège à la suite de l’intervention, avec une augmentation globale de 0,039 points de SD. Parmi les filles, on observe une amélioration plus prononcé des traits de caractère prédictif de la réussite ont  davantage gagné en caractère intellectuel et en réussite (p. ex., curiosité, courage, optimisme), tandis que les garçons ont surtout bénéficié  davantage dans leur caractère social (intelligence sociale, maîtrise de soi interpersonnelle).

L’intervention a également eu un impact positif sur le comportement des élèves, bien que cet effet ne se soit matérialisé qu’au bout des quatre années du programme. Le timing de cet impact suggère que le comportement peut être un facteur clé dans la réussite scolaire des élèves pour lesquels l’amélioration des notes n’a été observée qu’au cours de la dernière année du programme. Les améliorations comportementales étaient particulièrement prononcées parmi les élèves dont les comportements et notes scolaires avant le programme était le moins satisfaisant avant le programme; le programme a réduit les écarts de comportement par rapport à leurs homologues d’environ 20% pour ces deux groupes,

Ajustement des aspirations professionnelles: Le programme a eu un impact positif sur les aspirations professionnelles des élèves. La proportion d’étudiants aspirant à un emploi peu qualifié a diminué de deux points de pourcentage, tandis que la proportion d’étudiants aspirant à un emploi moyennement qualifié a augmenté de la même ampleur à la suite de l’intervention. L’impact du programme sur le niveau d’aspiration professionnelle des élèves était plus prononcé pour les filles, les récipiendaires de l’aide, et ceux dont les comportements et notes scolaires avant le programme était le moins satisfaisant.

Globalement, ces résultats suggèrent qu’encourager les élèves à un d’état d’esprit de développement peut être une approche efficace pour améliorer leurs résultats scolaires et réduire les inégalités entre les écoles. De plus, avec un coût de 65 € par élève, l’intervention s’est avérée être une alternative rentable aux programmes comparables. Cependant, l’intensité des impacts sur les élèves qui faisaient déjà montre de bons comportements et notes scolaires avant le programme suggèrent que les interventions cherchant à développer les compétences psychosociales des élèves peuvent augmenter les inégalités en matière de réussite scolaire au sein des écoles, au même moment qu’elles contribuent à réduire des écarts de performance entre les écoles.

1.
Smithers, Lisa G., Alyssa CP Sawyer, Catherine R. Chittleborough, Neil M. Davies, George Davey Smith, and John W. Lynch. "A systematic review and meta-analysis of effects of early life non-cognitive skills on academic, psychosocial, cognitive and health outcomes." Nature human behaviour 2, no. 11 (2018): 867-880.
2.
Bénabou, Roland, Francis Kramarz, and Corinne Prost. "The French zones d’éducation prioritaire: Much ado about nothing?." Economics of Education Review 28, no. 3 (2009): 345-356.
3.
OECD (2012), Equity and Quality in Education: Supporting Disadvantaged Students and Schools, OECD Publishing.
4.