Formation commerciale des clients d'un microcrédit, Pérou
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Policy issue
Partout dans le monde, la micro-finance a suscité l'enthousiasme car étant perçue comme une réponse aux problèmes de développement économique et comme un moyen permettant de réduire la pauvreté. Cependant, le niveau de risque élevé de non remboursements ou d'une mauvaise utilisation des fonds par les emprunteurs affecte les projets. Un débat important agite actuellement la communauté de la micro-finance : le rôle des préteurs doit-il se cantonner à octroyer des prêts ou bien, profitant de leurs liens avec les emprunteurs, leur rôle devrait-il être d’organiser des formations et d'améliorer ainsi les résultats de la micro-finance? La possibilité d’intégrer des formations sur la santé ou sur les bonnes pratiques commerciales lors des réunions de groupe constitue une occasion idéale d’apporter ces services à un coût minimum, mais cela implique que les clients aient une présence plus importante et plus régulière, ce qui peut potentiellement accroître le taux d’abandon.
Context of the evaluation
Le Pérou compte 29 millions d’habitants, dont près de la moitié vivent dans la pauvreté.1 Les institutions de micro-finance (IMF) espèrent améliorer leurs conditions de vie sociales et économiques en encourageant le développement de banques de village. FINCA Pérou est une IMF à but non lucratif, de taille modeste mais financièrement durable, qui travaille au Pérou depuis 1993 : elle y crée des banques de village à l’intention des femmes micro-entrepreneurs pauvres, leur donnant ainsi accès aux services financiers officiels. Les clientes sont relativement jeunes, ont un niveau d’instruction faible et sont souvent chargées de famille. Toutes les clientes ont créé des micro-entreprises : vente d'alimentation ou d’artisanat, agriculture à petite échelle. En moyenne, les clientes de la FINCA ont une épargne de 233 dollars, et des emprunts de 203 dollars, pour un taux de remboursement de 99 %.
Details of the intervention
Les chercheurs ont travaillé avec la FINCA à Ica et à Ayacucho, au Pérou, pour mesurer l’impact marginal de l’ajout d’une formation commerciale à un programme de prêt. La FINCA a parrainé 273 banques de village pour un total de 6.429 clients, pour la plupart des femmes. Ces banques ont été réparties en plusieurs groupes: 104 banques ont été obligées de participer à l’étude, 34 y ont participé de manière volontaire, et 101 banques ont constitué le groupe témoin.
Au cours des réunions organisées chaque mois à la banque, les clients du groupe test ont participé à 22 sessions de formation commerciale. Les documents de la formation, mis au point par la FINCA en collaboration avec les ONG Atinchik et Freedom from Hunger, avaient déjà été utilisés dans le cadre d’autres projets. Les sessions de formation comprenaient des exercices et des discussions avec les clients, ainsi qu’un cours visant à améliorer les pratiques commerciales comme par exemple : comment traiter les clients, comment utiliser les bénéfices, où vendre, comment faire des remises spéciales ou de la vente à crédit. Ainsi, pendant l’une des sessions, les formateurs ont demandé à chaque micro-entrepreneur de construire un budget pour son entreprise. Au sein du groupe témoin, rien n’a été modifié : les réunions de remboursement d’emprunt et de collecte de l’épargne ont eu lieu à la même fréquence qu’auparavant. Afin d’évaluer l’impact de la formation, les chercheurs ont collecté les données sur les taux d’abandon de projet, les taux de remboursement, la taille des emprunts, les montants d’épargne, la taille des entreprises et les revenus générés.
Results and policy lessons
L’impact sur les performances des entreprises a été très positif. En ce qui concerne les clients du groupe test, les ventes au cours du mois précédant les enquêtes de suivi étaient 15 % supérieures à celles du groupe témoin et les rendements étaient en moyenne 26 % plus élevés pendant les « mauvais mois », ceux pendant lesquels ils s'attendaient à une baisse des ventes. Les clients ayant reçu une formation commerciale ont tenu beaucoup plus souvent un registre pour suivre les retraits qu’ils effectuaient sur leur compte ; ils avaient par ailleurs une meilleure connaissance des aspects commerciaux et savaient comment utiliser leurs bénéfices pour innover et développer leur affaire. Il est intéressant de noter que les effets les plus significatifs ont été constatés chez les personnes qui avaient exprimé le moins d’intérêt pour la formation lorsque le programme a été mis en place. Ce résultat implique que les solutions "de marché" ne consistent peut-être pas à simplement faire payer le coût des services. Il est possible qu’après avoir essayé la démarche gratuitement, des clients qui au départ n’étaient pas de gros demandeurs, apprécient la valeur du service et de ce fait, le réclament ensuite.
L’impact sur les résultats de l’institution a été moins impressionnant. La proportion de clients abandonnant leur projet est restée élevée dans le groupe test: 59 % des clients ont quitté leur banque à un moment ou à un autre au cours de l’intervention, contre un taux légèrement supérieur de 63 % dans le groupe témoin. Organiser un telle formation revient cher: l'institution doit payer pour former son personnel et en plus acheter les documents. Cette opération a représenté une augmentation de 10 % des frais de FINCA. Cependant, l’amélioration du taux de rétention de clients a généré un chiffre d’affaires net supérieur au coût marginal de la fourniture de formation.
1 CIA World Factbook, “Peru,” https://www.cia.gov/library/publications/the-world-factbook/geos/pe.html (Consulté le 25 août 2009).