Soutien scolaire

TaRL activities taking place in a classroom in Gujarat, India
School girls learn to read in Pratham-designed after-school reading camps in India.
La problématique

Lors de la dernière décennie, beaucoup de pays en développement ont accru la scolarisation des enfants à l’école primaire, mais cela n’a pas toujours signifié une amélioration de leur apprentissage. C’est particulièrement vrai en Inde, où 96% des enfants de 6 à 14 ans sont scolarisés, mais où, parmi ceux ayant passé cinq années à l’école, 47% ne peuvent lire un texte simple et 62% ne savent pas faire une opération mathématique de base.1 Cela signifie qu'en zones rurales, bien plus de 40% des élèves de cinquième année ont un niveau réel correspondant au mieux à la deuxième année.2

Il y a beaucoup de raisons expliquant ce retard dans l’apprentissage : efforts de l’Etat concentrés sur l’augmentation du taux de scolarisation plus que sur l’amélioration de la pédagogie, professeurs mal formés, méthodes d’enseignement dépassées, mauvais ratios élèves-professeur, présence irrégulière des enfants à l’école, fort absentéisme des enseignants et enfin absence de dispositifs internes à l’école pour identifier les élèves en difficulté et les aider de manière opportune et efficace. S’ajoute à cela que ces enfants ne sont pas aidés chez eux : 50% des mères des élèves des zones rurales ne sont elles-mêmes jamais allées à l’école. La conséquence de tous ces facteurs est une éducation de faible qualité, qui souvent n’apporte aucun ou peu de savoir.

L’évaluation


Pratham est une ONG indienne qui se concentre sur les façons d’améliorer et d’accélérer l’apprentissage à l’intérieur du système éducatif existant. Ses interventions incluent l’introduction du soutien scolaire à l’intérieur des écoles, l’aide à l’apprentissage par des bénévoles issus des communautés locales, le développement de méthodes pédagogiques efficaces, la formation des enseignants, la mise à disposition de kits simples pour évaluer le niveau des élèves et un plaidoyer vigoureux pour que l'apprentissage soit réel dans les écoles.

En 2001, les chercheurs J-PAL, Abhijit Banerjee, Shawn Cole, Esther Duflo et Leigh Linden, ont évalué le programme Balsakhi, une action de soutien scolaire conçue par Pratham. Un tuteur (appelé Balsakhi ou l'ami des enfants) a été engagé dans environ 200 écoles primaires publiques de Vadodara et de Mumbai, afin qu’il travaille avec les élèves ayant pris du retard sur leurs camarades, en lecture et arithmétique élémentaires. Ce tuteur, en général une étudiante, était bien moins payé qu'un enseignant titulaire. Sur la durée de l’année scolaire, l’évaluation a montré une amélioration notable du niveau des élèves ayant bénéficié des cours de soutien, mais aussi de celui des élèves plus forts. Dans les classes bénéficiant du programme Balsakhi, le nombre d’élèves du tiers le plus faible ayant réussi les tests élémentaires en mathématiques et en langue a augmenté de 7,7%, tandis que celui du tiers le plus fort a augmenté de 4%. Le coût de 2,25 US dollars par an et par enfant ayant bénéficié du soutien scolaire est à comparer avec le coût moyen par élève en Inde, qui est de 78 US dollars par an.3 Pour plus d’informations sur ce projet, vous pouvez consulter sa  fiche d’évaluation.

En 2005, J-PAL a évalué un autre programme de soutien scolaire mis en œuvre par Pratham dans le district de Jaunpur, dans l’Uttar Pradesh, l’un des Etats indiens les plus en retard en matière d’éducation. Plusieurs interventions ont été essayées dans le but d’améliorer les résultats de l’apprentissage : deux des interventions se concentraient sur le partage d’information sur les niveaux d’apprentissage, tandis que la troisième incluait aussi une action de soutien. Dans le cadre de cette dernière intervention, plus intensive, des « fiches sur le niveau d’apprentissage » ont été préparés dans chaque village à partir des résultats des enfants. Le bas niveau de réussite des enfants, mis en évidence par ces fiches, a été discuté dans des réunions de village. En plus de ces discussions, Pratham a organisé des démonstrations pendant quelques jours, pour montrer avec quelle vitesse et efficacité un enfant pouvait apprendre à lire. Des bénévoles locaux ont aussi été formés aux techniques permettant d’aider les enfants à apprendre à lire et ont été encouragés à tenir des groupes de lecture après l’école pour les enfants en ayant besoin.
Les résultats de l’évaluation faite par J-PAL suggèrent que le programme a été efficace pour les enfants ayant suivi les groupes de lecture : les enfants incapables de lire au moment de l’enquête initiale étaient 7,9% de plus à être ensuite en mesure d'au moins déchiffrer les lettres ; ceux qui déchiffraient les lettres au moment de l’enquête initiale étaient 3,5% de plus à être capables de lire des mots ou des paragraphes, et 3,3% à lire des histoires entières. Pour plus d’informations sur ce projet, vous pouvez consulter sa fiche d’évaluation.

La principale difficulté de ce programme fondé sur le bénévolat a été que le nombre de bénévoles dans chaque village s’est révélé insuffisant compte tenu du nombre d’enfants nécessitant une aide supplémentaire. Pour cette raison, Pratham a évolué vers un modèle alternatif, appelé « Read India », utilisant des méthodes et matériels pédagogiques similaires, mais faisant appel à des enseignants des écoles publiques existantes en plus des bénévoles issus des villages. En 2009, des chercheurs J-PAL ont commencé à évaluer différentes variantes de cette nouvelle version de Read India dans quelques secteurs des Etats du Bitar et de l’Uttarakhand. Les actions sont menées conjointement par Pratham et par l’administration de ces deux Etats, pour une durée de deux années scolaires. Elles incluent une combinaison de formation des enseignants, de suivi de leur travail, d’amélioration des matériels pédagogiques et de recours à des bénévoles. Pour plus d’informations sur ce projet, vous pouvez consulter sa fiche d’évaluation.

Projets généralisés


(i) Read India: La Fondation William et Flora Hewlett et la Fondation Bill et Melinda Gates se sont unies en 2007 pour soutenir les programmes évalués de façon rigoureuse et visant à améliorer la qualité de l’éducation dans les pays en développement. Pratham a reçu l’une de leurs premières dotations, d’un montant de 9,1 millions de dollars US, pour généraliser Read India.4 Cette campagne pour améliorer la lecture, l’écriture et l’arithmétique élémentaire pour les enfants de 6 à 14 ans a été généralisée dans plus de 300 des 600 districts indiens.

Cette campagne utilise deux stratégies principales, fondées sur les besoins locaux : l’une via les écoles et les enseignants, l’autre avec l’aide des villageois bénévoles. Les deux ont le même but : tous les enfants indiens devraient pouvoir lire aisément, maîtriser l’arithmétique élémentaire et bien communiquer par écrit. Pratham a développé de nouveaux supports de lecture pour les élèves, ainsi que des méthodes d’enseignement et de formation conçues pour être plus accessibles et efficaces, au vu des conditions actuelles dans le système éducatif indien. La formation des enseignants est effectuée conjointement avec l’administration de l’Etat, comme faisant partie des projets SarvaShikshaAbhiyan (Education pour tous). Depuis le lancement de Read India, Pratham a établi des partenariats avec douze Etats indiens. Pour 2009-2010, il y a un partenariat officiel dans huit Etats.

L’évolution de Read India comme campagne nationale




A son pic, à l’été 2008, la campagne Read India a touché 305 000 des 600 000 villages indiens et a mobilisé 450 000 bénévoles. Plus de 600 000 enseignants et fonctionnaires ont été formés. En 2008-2009, la campagne a touché 33 millions d’enfants dans 19 Etats. Dans la plupart d’entre eux, parmi les enfants inclus dans l’intervention, la proportion de ceux incapables de lire l’alphabet est tombée à zéro. De la même manière, la proportion d’enfants capables de lire des phrases simples a augmenté de près de 20%.5 Lors des trois prochaines années, Read India va passer à l’étape suivante, Read India II, qui se concentrera sur des niveaux d’enseignement plus élevés, et sur des sujets et contenus adaptés aux classes de niveau 5 à 8. Pour en savoir plus sur cette intervention, vous pouvez vous aller sur www.pratham.org.

(ii) Summer Campaign: En 2008, Pratham a lancé des camps d’été Read India,  correspondant à un mois d’activité intensive dans 400 000 villages de l’Inde entière, touchant environ 15 millions d’enfants.6 Ces camps d’été ciblaient les élèves d'écoles primaires en difficulté et visaient à les faire rattraper leur retard avant que les cours ne recommencent en juillet. Une analyse préliminaire faite dans l'Etat du Bihar montre qu’il y a eu un impact modeste mais significatif sur le niveau général de lecture dans les villages, et un impact bien plus fort sur le sous-groupe des enfants ayant participé aux sessions – ce qui montre l’efficacité de cibler les élèves en difficulté.




1 ASER 2009 “National Findings,” http://www.asercentre.org/asersurvey/aser09/pdfdata/National%20finding%20India.pdf.
2 ASER 2009, “National Highlights 2009,” http://www.asercentre.org/asersurvey/aser09/pdfdata/national%20highlights.pdf.
3 J-PAL Policy Briefcase No.2, “Making Schools Work for Marginalized Children: Evidence from an inexpensive and effective program in India,” November 2006.
4 “The Hewlett and Gates Foundations Award $9 Million to Pratham,” July 5, 2007 http://www.hewlett.org/newsroom/the-hewlett-and-gates-foundations-award-9-million-to-pratham-s-read-india-campaign
5 Pratham, “What We Do: Read India,” http://www.pratham.org/M-19-3-Read-India.aspx.
6 Pratham, “Hewlett Foundation: Grant 2007-9570, Annual Report 2007-08,” p.25, http://readindia.org/common/images/pdf/report.pdf.
Pratham, “Summer Camps 2008 Report,” http://www.pratham.org/images/summer-camp-report2007-08.pdf.
1.
Banerjee, Abhijit, Rukmini Banerji, James Berry, Esther Duflo, Harini Kannan, Shobhini Mukherji, Marc Shotland, and Michael Walton. 2016. “Mainstreaming an effective intervention: Evidence from randomized evaluations of “Teaching at the Right Level” in India.” National Bureau of Economic Research Working Paper No. w22746, October 2016.
2.
ASER Centre. 2019. “Annual Status of Education Report (Rural) 2018.” New Delhi: ASER Centre.
3.
 Uwezo. 2016. "Are Our Children Learning? Uwezo Uganda 6th Learning Assessment Report." Kampala: Twaweza East Africa.
4.
World Bank. 2018. “World Development Report 2018.” https://www.worldbank.org/en/publication/wdr2018; Bhula, Radhika and John Floretta. 2020. “A Better Education for All During–and After–the COVID-19 Pandemic.” Stanford Social Innovation Review. October 16, 2020.
5.
“Covid learning loss has been a disaster.” The Economist. July 7, 2022. https://www.economist.com/international/2022/07/07/covid-learning-loss-has-been-a-global-disaster 
6.
“The State of Global Learning Poverty: 2022 Update.” World Bank, UNESCO, UNICEF, USAID, FCDO, Bill & Melinda Gates Foundation. June 2022. https://www.unicef.org/reports/state-global-learning-poverty-2022