Accompagnement des demandeurs d'emploi – OPP/CVE, France

Fieldwork by:
Location:
France
Sample:
44 000 demandeurs d'emploi, répartis dans environ 216 agences publiques de l'emploi
Chronologie:
2005 - 2008
Target group:
  • Job seekers
Outcome of interest:
  • Employment
Intervention type:
  • Job counseling
AEA RCT registration number:
AEARCTR-0000472
Partners:

Policy issue

Au cours des dernières décennies, les chercheurs et décideurs politiques ont accordé une attention croissante au conseil en matière d’emploi, qu’ils considèrent comme une solution potentielle au chômage. Les évaluations ont démontré que l’orientation des demandeurs d’emploi peut être très efficace, d’autant plus lorsqu’on compare cette solution à d’autres politiques du marché du travail, telles que la formation et l’emploi subventionné.

Plusieurs pays développés, dont l’Australie, les Pays-Bas et la France, ont élargi l’offre de conseil individuel en matière d’emploi en confiant ces services à des prestataires privés.


La question de savoir si les prestataires privés peuvent fournir ces services de manière plus efficace que le secteur public reste ouverte. En théorie, la dynamique du marché pourrait inciter les prestataires privés à fournir des services moins coûteux et de meilleure qualité. Toutefois, la structure du contrat peut avoir des effets négatifs sur ces incitations. Si le contrat prévoit un paiement fixe important par demandeurs d’emploi inscrit, les prestataires peuvent être incités à recruter un grand nombre de demandeurs d’emploi sans offrir de conseils de qualité par la suite. En revanche, si une plus grande partie du paiement est versée lorsque les personnes accompagnées trouvent du travail, les conseillers privés pourraient être tentés de ne sélectionner que les demandeurs d’emploi ayant les meilleures perspectives de retour à l’emploi, ce qui irait à l’encontre de l’objectif du programme. Sans comparaison empirique de l’effet des programmes d’orientation professionnelle publics et privés, il n’est pas possible de savoir si l’externalisation des services  d’orientation professionnelle est une politique efficace.

Context of the evaluation

En France, comme dans de nombreux autres pays européens, le chômage de longue durée a considérablement augmenté à la fin des années 1970 et est resté à des niveaux très élevés depuis cette période. Le chômage de longue durée peut avoir un certain nombre de conséquences négatives, notamment la pauvreté, la perte de compétences pratiques, le rétrécissement des réseaux sociaux au niveau individuel, ainsi qu’une diminution potentielle de la cohésion sociale à l’échelle de la société.

En 2007, l’Agence Nationale Pour l’Emploi (ANPE) a lancé un programme de conseil intensif destiné aux demandeurs d’emploi présentant un risque de chômage de longue durée. A peu près au même moment, l’Unédic, l’organisme français d’indemnisation du chômage, a lancé un programme d’accompagnement similaire, proposé dans le cadre de contrats avec des entreprises privées.

Photo: Aude Guerrucci | J-PAL/IPA

Details of the intervention

Une évaluation randomisée des programmes de l’ANPE et de l’Unédic a été réalisée de janvier à décembre 2007, couvrant 216 agences publiques locales pour l’emploi dans quatre régions françaises (sur un total de 22 régions au moment de l’évaluation). L’objectif de l’évaluation était de mesurer l’impact d’un programme de conseil renforcé lorsqu’il est proposé par des prestataires privés ou par les services publics de l’emploi. Près de 44 000 demandeurs d’emploi ont été sélectionnés de manière aléatoire pour participer à l’évaluation. L’éligibilité était limitée aux demandeurs d’emploi s’inscrivant au chômage et ayant droit à au moins un an d’allocations.

L’évaluation a réparti de manière aléatoire les demandeurs d’emploi dans l’un des deux groupes d’intervention ou dans le groupe témoin, au début de leur période de chômage. Les personnes assignées aux groupes d’intervention étaient libres de participer ou non au programme. Dans le cas où les personnes ne souhaitaient pas participer, elles étaient redirigées vers le parcours standard.

Les chercheurs ont recueilli des données administratives et des données d’enquête au cours des douze mois suivant l’affectation aux trois groupes expérimentaux afin de suivre la situation professionnelle des participants et la durée de leurs périodes de chômage.

Intervention 1 : Accompagnement intensif par le secteur public

Chaque conseiller a été affecté à un maximum de quarante clients. Des réunions hebdomadaires ont été organisées pour apporter un soutien à la recherche d’emploi et aux candidatures. Le programme a duré six mois et le coût estimé par client était de 657 euros.

Intervention 2 : Accompagnement intensif par le secteur privé

Chaque conseiller a été affecté à un maximum de quarante clients. Les réunions étaient hebdomadaires. Le programme a duré six mois et le coût estimé par client variait entre 900 et 3947 euros, selon que le client ait été placé ou non dans un emploi stable dans les six mois suivant le début du programme.

Groupe témoin : Accompagnement public standard

Chaque conseiller avait en moyenne 120 clients et les réunions étaient mensuelles. Le coût estimé par client était de 120 euros.

Results and policy lessons

L’accompagnement intensif a permis d’accélérer le placement des demandeurs d’emploi par rapport au programme standard, de faible intensité. Toutefois, le programme intensif public a eu un impact plus rapide et plus important que le programme intensif dispensé par le secteur privé.

Après trois mois, l’effet du programme intensif public sur le chômage des participants était plus important et l’est resté pendant toute la durée de l’étude. Après six mois, ce même programme permettait d’augmenter la probabilité de sortir du chômage et de trouver un emploi de 50 pour cent (une hausse de 10.2 points de pourcentage à partir d’une base de 20.7 pour cent). Cet effet était plus de deux fois supérieur à celui du programme privé, qui augmentait la probabilité de retour à l’emploi de 22 pour cent (soit une hausse de 4.5 points de pourcentage).

Le programme d'accompagnement intensif par le secteur public a également été plus efficace pour aider les participants à trouver un emploi stable. Ce programme a augmenté de 34 pour cent la probabilité de trouver un emploi d’une durée d’au moins six mois à la fin de la période d’accompagnement, soit une hausse de 7.2 points de pourcentage par rapport à la situation contrefactuelle. Le programme privé a permis d’augmenter la probabilité de trouver un emploi stable de 27 pour cent, soit une hausse de 5 points de pourcentage.

Les prestataires privés ont été moins rentables que les prestataires publics. Le coût plus élevé de l’externalisation du conseil intensif vers des prestataires privés n’a pas été compensé par une réduction du nombre de jours d’allocations chômage versées par le gouvernement. Les chercheurs estiment que le programme privé a augmenté les dépenses nettes totales par demandeurs d’emploi inscrit d’environ 1162 euros. Le programme intensif public a légèrement réduit les coûts nets par demandeurs d’emploi pour le gouvernement, mais la différence n’était pas statistiquement significative.

Les incitations contractuelles et les motivations des demandeurs d’emploi peuvent contribuer à expliquer les performances moindres du programme privé. Les chercheurs ont constaté que le programme privé avait un impact limité sur les candidats ayant les meilleures perspectives de retour à l’emploi. Ce constat pourrait s’expliquer par les incitations créées par le contrat. Les prestataires privés ont reçu un paiement important conditionné au placement, de sorte que pour maximiser leurs gains, ils elles ont pu juger efficace de concentrer leurs efforts sur les candidats ayant les perspectives de retour à l’emploi les plus faibles, en comptant sur les meilleurs candidats pour trouver un emploi par eux-mêmes. Les sanctions à l’encontre des demandeurs d’emploi inactifs, y compris la radiation temporaire ou permanente de la liste de chômeurs, ont également été appliquées moins fréquemment aux candidats inscrits au programme privé, ce qui peut avoir un impact sur les efforts déployés pour trouver un emploi.

Malgré le recours croissant au secteur privé pour les services d’orientation professionnel, il n’existe pas de preuves suffisantes pour affirmer que l'externalisation est plus efficace. Cette évaluation remet en question l'idée que la prestation privée garantit un service de meilleure qualité ou moins coûteux, ou que la dynamique du marché entraîne automatiquement une plus grande efficacité. Les arguments en faveur de l'externalisation doivent encore être étayés par des preuves rigoureuses.

La création des contrats et les incitations offertes aux prestataires privés peuvent influer sur leurs performances. Les performances des prestataires privés semblent être étroitement liées à la structure de leur contrat. Un paiement conditionnel élevé dépendant du placement peut encourager les prestataires à inscrire autant de participants que possible et à les maintenir jusqu'à ce qu'ils trouvent un emploi éligible au paiement, même si les participants ne respectent pas les exigences du programme. Les prestataires peuvent également être encouragés à maximiser leurs profits en fournissant un service différencié à des demandeurs d'emploi ayant des perspectives d'emploi différentes. Dans cette évaluation, les sanctions à l'encontre des demandeurs d'emploi inactifs étaient nettement moins fréquentes pour les candidats inscrits au programme privé, et les prestataires privés étaient beaucoup moins efficaces avec les demandeurs d'emploi les plus aptes à l'emploi.

 

Behaghel, L., B. Cr̩pon, M. Gurgand, and T. Le Barbanchon. "Sample Attrition Bias in Randomized Experiments: A tale of Two Surveys." Working Paper, Paris School of Economics, May 11, 2009. Behaghel, Luc, Bruno Cr̩pon, and Marc Gurgand. "Evaluation d'impact de l'accompagnement des demandeurs d'emploi par les op̩rateurs priv̩s de placement et le programme Cap vers l'enterprise." Working Paper, Paris School of Economics, September 2009.
1.
The results on this page report the impact of the public or private intensive counseling program on jobseekers who actually participated in them. These percentage point changes are the impact of either the public or private intensive program on a given outcome relative to the comparison group, weighted by the proportion of jobseekers who actually participated in that program. Economists call this a “local average treatment effect.”