Efficacité et image de la Police, Rajasthan, Inde

Fieldwork by:
Location:
État du Rajasthan, Inde
Sample:
150 commissariats de police sur 10 districts
Chronologie:
2006 - 2008
Target group:
  • Police
Outcome of interest:
  • Citizen satisfaction
  • Provider Performance
Intervention type:
  • Policing
  • Community monitoring
  • Police skills training
AEA RCT registration number:
AEARCTR-0001362
Partners:

Policy issue

Les recherches en économie du développement se focalisent de plus en plus sur l’importance d’une bonne gouvernance dans la mesure où celle-ci est une condition préalable et nécessaire au développement économique lui-même et qu'elle constitue un facteur déterminant pour le bien-être de la communauté. De toutes les fonctions régaliennes, la plus importante est sans doute celle qui consiste à assurer la sécurité des citoyens par l’intermédiaire de forces de police efficaces.

Pour que la police puisse opérer de manière optimale, elle doit assurer le maintien de l’ordre, ce qui exige que le public ait confiance en elle et lui fasse confiance. Dans de nombreux pays en développement, la police est confrontée à des problèmes d’inefficacité et de corruption. De plus, une culture de repli sur elle-même l’empêche d’être plus performante, et lui donne une image négative auprès du public.

Context of the evaluation

La police de l’État du Rajasthan n’échappent pas à cette règle et ont de grandes difficultés pour améliorer leur professionnalisme, leur transparence et leur réactivité. Les résultats d’enquêtes révèlent que le public considère que la police agit de manière injuste et que les policiers sont corrompus et paresseux. La perception que les forces de police ont d’elles-mêmes se révèle tout aussi négative: les policiers se sentent surmenés, dévalorisés et victimes de manipulations politiques. Bien que les dirigeants de la police de l’État du Rajasthan aient tenté plusieurs réformes pour améliorer les performances et le moral de leurs troupes, les résultats n’ont jamais été très clairs, en raison d’une part du manque d’indicateurs quantitatifs permettant de mesurer les effets de ces réformes, et d’autre part parce que ces réformes étaient déployées de manière sélective, sur des périmètres qui ne correspondaient pas au profil moyen des commissariats de police.

Image of Rajasthan police in uniforms and with masks walking in two rows.
Rajasthan police conduct a flag march in Beawar.
Photo: Sumit Saraswat | Shutterstock.com

Details of the intervention

Ayant pris conscience de ces problèmes, la Police du Rajasthan a décidé de s’associer aux chercheurs de J-PAL pour organiser une intervention afin d’améliorer ses performances et son image auprès de l’opinion publique. Elle souhaitait aussi recueillir des données sur les taux de criminalité et son efficacité à y faire face. L’enquête ayant identifié un certain nombre de priorités à traiter, les dirigeants (avec l’aide des chercheurs) ont retenu 4 interventions, mises en œuvre de manière aléatoire dans 150 postes de police répartis sur 11 districts du Rajasthan. Le groupe témoin comprenait 25 postes de police.

Tous les postes de police du groupe test ont reçu une formation interne dispensée par l’Académie de Police du Rajasthan à Jaipur. La formation comprenait des cours destinés à améliorer le niveau de compétence et les connaissances scientifiques de 350 agents-enquêteurs. Parallèlement à cette formation théorique, les policiers ont reçu une formation leur permettant d’améliorer leurs compétences relationnelles (communication, médiation, gestion du stress). Ils ont aussi travaillé sur leur motivation et sur l’esprit d’équipe. Ensuite, dans tous les postes de police du groupe test, les mutations administratives ont été gelées pendant un an et demi, car l’enquête avait fait ressortir le fait que les fréquentes mutations étaient préjudiciables aux policiers et à leurs familles.

Certains postes de police ont également invité des bénévoles locaux, appelés “observateurs communautaires”, à s’installer dans le commissariat 3 heures par jour, le matin et le soir, pour y observer les activités des policiers au quotidien. L’objectif était de sensibiliser le public au rôle de la police et d’améliorer le comportement des policiers par un contrôle informel. Certains postes de police ont institué un jour de congé hebdomadaire avec un système de rotation des tâches. Tous les policiers travaillant dans les postes de police sélectionnés avaient le droit à un jour de congé tous les sept jours. Enfin, on a proposé à chaque agent d’exécuter toutes les tâches à tour de rôle, grâce à un système de rotation de tâches permettant de répartir plus équitablement le travail entre tous les policiers. Ces différentes initiatives ont permis aux policiers de travailler dans un environnement plus transparent, plus juste et plus susceptible de réduire le stress.

L’impact du projet fut mesuré à l’aide d’une enquête initiale et d’une enquête finale auprès de 7981 individus sélectionnés de manière aléatoire ans la zone de ressort des 150 postes de police. Ces enquêtes portaient sur les thèmes suivants : opinion publique et police, l’expérience de la criminalité, les expériences passées avec la police. Des enquêtes ont également été menées auprès d'environ 50 % des personnels de police, soit 2367 agents. Cette étude, visait à évaluer la satisfaction des policiers, leur efficacité et leurs performances.

Results and policy lessons

Les enquêtes menées auprès du public: elles ont révélé que la mise en place d'une formation des personnels de police et la stabilisation de leurs affectations amélioraient sensiblement leur image auprès de la population. En augmentant le nombre d’officiers de police formés de 0 % à 100 %, on obtient une amélioration de 31 % de la probabilité que les victimes de délits se déclarent satisfaites des enquêtes menées par la police. Dans la mesure où, en moyenne, seules 27 % des victimes se disent satisfaites, ces améliorations constituent une hausse de plus de la moitié de la satisfaction des victimes. De plus, on constate une augmentation de 26 % de la probabilité qu’une arrestation soit réalisée au cours d’une enquête. Les postes de police ayant appliqué le gel des mutations ont enregistré une augmentation de 30 % du nombre de victimes satisfaites des enquêtes de police. Les formations, tant sur le plan du travail d’enquête qu’au niveau des relations publiques, ont eu des effets positifs sur la satisfaction du public et sur l’efficacité des enquêtes.

Les enquêtes au sein de la police: le moral des policiers a progressé grâce à la mise en place du jour de congé hebdomadaire et grâce au programme de rotation de tâches, même s'il semble que ces effets n'ont pas eu d'influence sur la manière dont le grand public a perçu les performances des policiers. Enfin, le projet des "Observateurs Communautaires" n’a eu aucun impact sur la manière dont le public percevait les policiers. L’enquête de satisfaction menée auprès des policiers a révélé qu’en dehors précisément de la présence d’observateurs dans les postes de police, ils avaient ressenti une plus grande satisfaction au travail.

Ces résultats démontrent qu’il est possible d’améliorer dans un délai assez court le regard que le public porte sur la police, en usant des méthodes adéquates, c'est-à-dire d'une palette d’interventions peu onéreuses et faciles à mettre en œuvre.

Banerjee, Abhijit, Esther Duflo, Daniel Keniston, and Nina Singh. "Can Institutions Be Reformed from Wtithin? Evidence from a Randomized Experiment with the Rajasthan Police." Working Paper, MIT, February 2012. Banerjee, Abhijit, Raghabendra Chattopadhyay, Esther Duflo, Daniel Keniston, and Nina Singh. "Improving Police Performance in Rajasthan, India: Experimental Evidence on Incentives, Managerial Autonomy and Training." NBER Working Paper No. 17912, November 2014.