Les effets du marketing sur le marché du crédit à la consommation en Afrique du Sud (évaluation de l'effet de composantes psychologiques)

Location:
Afrique du Sud
Sample:
53 194 anciens clients majoritairement urbains
Chronologie:
2003 - 2006
Target group:
  • Adults
Outcome of interest:
  • Take-up of program/social service/healthy behavior
Intervention type:
  • Credit
  • Information
  • Pricing and fees
AEA RCT registration number:
AEARCTR-0001319
Partners:

Policy issue

Dans tous les domaines, les entreprises dépensent des milliards de dollars chaque année en publicité afin d’influencer les consommateurs, et les institutions de microfinance ne font pas exception. Les théories économiques mettent l’accent sur le contenu informatif de la publicité, mais les publicitaires tentent également de convaincre les consommateurs avec des contenus « créatifs » et des éléments design qui ne sont pas purement informatifs. Les décisions publicitaires ne sont pas sans conséquence : la décision d'accepter un emprunt ou un compte épargne est une composante essentielle du succès d'une intervention ayant pour but d’augmenter l’accès aux services financiers. Bien que les études en laboratoire aient montré que les contenus « créatifs » peuvent affecter la demande, les chercheurs ont rarement utilisé les expérimentations de terrain pour analyser les effets des contenus publicitaires. Ainsi, bien que les tentatives pour convaincre les consommateurs avec des publicités non informatives soient courantes, on sait peu comment et combien ces publicités influencent le choix des consommateurs dans un contexte réel comme celui de l’Afrique du Sud.

Context of the evaluation

Credit Indemnity, l'organisme de prêt collaborant à cette étude, agit depuis plus de 20 ans comme l’un des prêteurs les plus importants et les plus rentables. Il propose des crédits de petits montants à taux d’intérêts élevés, à court terme et sans demande de garantie, avec un remboursement mensuel fixe. Ses clients sont des travailleurs pauvres qui n’ont généralement jamais fait d'emprunt ou n’ont pas les garanties financières suffisantes pour emprunter dans les institutions traditionnelles comme les banques commerciales. Les données disponibles suggèrent que les emprunteurs utilisent leur crédit pour des produits de consommation (nourriture, habillement, transport), pour investir (éducation, logement) ou encore pour rembourser d’autres dettes.

Photo: Nataly Reinch | Shutterstock.com

Details of the intervention

Collaborant avec cet organisme de crédit très rentable d'Afrique du Sud, les chercheurs ont voulu déterminer les effets de la publicité sur les demandes d’emprunts.
Le prêteur a envoyé des courriers à 53 194 clients habituels majoritairement urbains, en leur proposant un nouvel emprunt avec un taux d’intérêt aléatoirement fixé allant de 3.25% à 11.75% par mois. Ces envois avaient des formes diverses. Premièrement, il y a eu des variations dans le contenu publicitaire

  1. La photographie d’une personne sur la lettre
  2. Une suggestion sur la façon d’utiliser l’emprunt
  3. Un tableau contenant un petit ou un grand nombre d’exemples d’emprunt
  4. Des informations sur le taux d'emprunt et sur le remboursement
  5. Une comparaison avec les taux d’intérêts de la concurrence
  6. La mention d’une tombola
  7. Une référence à un taux « spécial » ou « faible »
  8. Une mention indiquant que le prêteur offre ses services également en langue local

Une autre randomisation portait sur la période de la validité de l’offre qui allait de 2 à 6 semaines.

Environ 8,5% des clients ayant reçu ce courrier ont souscrit un emprunt, parmi lesquels 4 000 répondaient aux critères établis par la banque et furent donc acceptés. Comme le contenu de la lettre était enregistré dans le profil du client, les chercheurs ont pu définir quelle sorte de stratégie publicitaire était associée à la plus forte demande d'emprunt.

Results and policy lessons

Impact du contenu publicitaire sur la demande : les 8 variations publicitaires ont des effets significatifs sur la demande d’emprunt, mais non sur le montant de l’emprunt ou sur le nombre de défauts de paiement. Les effets du contenu publicitaire sont plus élevés que ceux relatifs au prix. Montrer un exemple d’emprunt au lieu de quatre augmente autant la demande qu’une réduction de 25% sur le taux d’intérêt mensuel. Montrer une photo de femme ou ne pas suggérer d'utilisation particulière pour l’emprunt a le même effet. De plus, les caractéristiques psychologiques sans lien avec le prix sont relativement plus efficaces quand le taux d’intérêt est relativement élevé. En d’autres termes, les facteurs psychologiques importent plus sur les offres d’emprunts les moins attractives (en matière de prix).

Impact des canaux publicitaires : les clients ont réagi fortement aux composantes non financières de l'offre. Ils ont préféré qu’on leur montre moins d’exemples d’emprunt, qu'il y ait une photo attirante, et qu’on ne leur dise pas comment dépenser leur emprunt. La réussite de ces caractéristiques montre que le contenu publicitaire est plus efficace quand il vise à déclencher une réponse intuitive ou rapide et sans effort, plutôt qu'une réponse réfléchie ou raisonnée.

Impact des délais : contrairement au présupposé qu’une courte période de validité aide à lutter contre une attention limitée ou contre la procrastination, il n'a pu être démontré que les délais courts aient augmenté la demande. En fait, la demande augmente beaucoup lorsque la date limite fixée aléatoirement passe de deux à six semaines. Ainsi, même dans le cadre d'un marché compétitif avec des taux élevés et des clients expérimentés, les subtiles caractéristiques psychologiques apparaissent comme de puissants leviers du comportement.

Bertrand, Marianne, Dean Karlan, Sendhil Mullainathan, Eldar Shafir, and Jonathan Zinman. 2010. "What's Advertising Content Worth? Evidence From a Consumer Credit Marketing Field Experiment." The Quarterly Journal of Economics 125(1): 263-306.